Sorry, boys
Sorry, boys s’inspire d’un fait divers qui a défrayé la chronique d’une petite ville du Massachusetts en 2000 : 18 lycéennes de moins de 16 ans décidaient de tomber enceinte en même temps pour élever leurs enfants ensemble.
Le spectacle s’ouvre sur un apparat scénique proprement saisissant, une trouvaille de la brillante scénographe Paola Villani. Dans la pénombre surgissent douze têtes coupées, marionnettes accrochées sur des tableaux comme autant de trophées de chasse. D’un côté, six adultes : parents, directeur et infirmière du lycée ; de l’autre, les pères adolescents. Un flot de SMS versés sur grand écran - que s’échangent les jeunes femmes, invisibles - insuffle une esthétique numérique contrastant résolument avec l’univers de la marionnette, mais qui l’aspire à la dérobée dans sa sphère contemporaine.
Les protagonistes tentent de comprendre les raisons du pacte de maternité entre ces adolescentes. Comment un féminicide dans leur ville a-t-il pu engendrer cette grossesse collective ? Les uns et les autres en débattent, mais n'en restent pas moins cloués au mur.
Dernier épisode d'une trilogie explorant les résistances féminines, Sorry, boys s'inscrit dans un travail politique, à la fois féministe et antifasciste, d'une grande subtilité. Manipulant seule les douze marionnettes, et en assurant, seule aussi, toutes les voix, Marta Cuscunà réalise ici une performance exceptionnelle, au retentissement visuel et sonore indélébile.
Dans le cadre de la 11e Biennale internationale des arts de la marionnette, deux autres spectacles de Marta Cuscunà sont à découvrir Il Canto della caduta les 13 et 14 mai et La Semplicità ingannata les 16 et 17 mai. En savoir plus
Une pièce palpitante de Marta Cuscunà, où le portrait contemporain du féminisme et des nouvelles masculinités infiltre l’univers de la marionnette !
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Jour futur
Après l’accueil en 2021 de Eighteen, très belle pièce de Thierry Micouin en duo avec sa fille, Le Carreau du Temple présente la nouvelle création du chorégraphe, qui retrouve sa grande complice plasticienne sonore Pauline Boyer dans une énergie punk-rock. Une danse magnétique, dans une atmosphère hypnotique.
Animés par un goût inconditionnel pour les esthétiques musicales des années 7o, les deux artistes proposent, depuis leurs débuts, des créations qui mêlent danse, musique, performance et arts numériques.
Jour futur donne à incarner à quatre danseurs une référence du Krautrock (rock progressif allemand), Future days, album du groupe CAN sorti en 1973, et tout ce qu’elle évoque. Apparu en une année charnière où le crescendo des théories libérales accusait l’émergence d’un « nouveau monde », ce troublant album augurait de crises qui nous bouleversent aujourd’hui. Comme un hommage à ces signes précurseurs, sur un sol blanc se chargeant progressivement de corps et de matière sombre, leur réinterprétation de l’album déploie un nouveau territoire acoustique émaillé de sons concrets, une architecture chorégraphique envoûtante, un déchaînement psychédélique de gestes et de lumière.
Sur un sol blanc qui se charge progressivement d’une matière noire, la réinterprétation de l'album donne lieu à un nouveau territoire acoustique, une architecture chorégraphique abstraite agencée en quatre parties. Quatre interprètes offrent une danse répétitive, partitionnelle et envoûtante ; un déchaînement communicatif soutenu par des battements lumineux psychédéliques.
La nouvelle création punk-rock et hypnotique du chorégraphe Thierry Micouin, en complicité avec la plasticienne sonore Pauline Boyer !
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PARTITION(S)
Titre complet : PARTITION(S) Du décollement des sentiments et des affects - Phase 2
Pièce inspirée par les Suites pour violoncelles de Bach, PARTITION(S) invite le spectateur à percevoir la musique et la danse avec acuité, à la fois dans leur singularité, leur simultanéité et leur réciprocité. Une expérience suspendue, comme hors du temps.
Jean-Christophe Boclé, danseur et chorégraphe aguerri à la danse baroque, partage ici les imaginaires qui ont nourri son parcours : une approche organique étayée par des cartographies corporelles, des formes de dictées intérieures et de couleurs mentales, des modèles géométriques, textuels ou chromatiques, une écriture qui s’invente et se transmet entre générations d’interprètes.
PARTITION(S), c’est une traversée spirituelle, énergétique et physique du monde des Suites de Bach. Se détachant des sentiments et des affects, les gestes essentiels du danseur émergent dans leur primauté, ces gestes qui sous-tendent l’espace et le temps des intériorités et de leurs arborescences. En offrant à la danse ce support à multiples entrées, l’artiste amplifie les interactions possibles entre chorégraphie et musique, tout en interrogeant les relations entre abstraction et sentiment, mathématiques et composition.
En savoir plus : Jean-Christophe Boclé revient sur les origines de son spectacle, sa relation particulière à la musique et partage le processus de création de son projet dans un entretien accordé à MaCulture.fr à lire ici
Atelier Danse et expression corporelle autour du spectacle PARTITION(S)
Samedi 4 février 2023 de 14h à 16h
Entrez dans les coulisses de la création du spectacle PARTITION(S) lors d’un atelier mené par les interprètes et le chorégraphe !
Une pièce hors du temps de Jean-Christophe Boclé, entre partition chorégraphique à entrées multiples et partition musicale de Bach !
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Clocks & Clouds
Noé Soulier ne cesse d’explorer de nouveaux espaces et nouveaux dispositifs. Ici, l’aventure est celle d’un très grand format conçu avec 35 étudiant·e·s danseur·euse·s et 13 solistes de l’Ensemble intercontemporain, dans la grande Halle du Carreau du Temple.
À trente-cinq ans, Noé Soulier a déjà signé une quinzaine de pièces qui ont voyagé dans le monde et dirige le Centre National de Danse Contemporaine d’Angers, prestigieuse institution de création, de diffusion et d’enseignement. Croisant une approche plurielle des espaces de représentation et une réflexion philosophique imbriquant étroitement pratiques corporelles, créatives et analytiques, le chorégraphe crée ici un maillage de trajectoires dont émergent à la fois un commun et un ensemble d’individualités.
S’emparant de la Halle, une composition chorégraphique se tisse en temps réel sous nos yeux, qui s’en réfère aux croisements ordinaires de passants sur une place. Dans la lignée de ses travaux autour des gestes du quotidien, Noé Soulier plonge à la racine des mouvements naturels d’un corps pré-discursif pour réveiller une part de la charge affective qu’ils contiennent. Le Concerto de chambre (1969) du compositeur György Ligeti a servi de point d’appui au chorégraphe pour cette création, interprété en live par les solistes de l'Ensemble intercontemporain.
Attention : Les retardataires ne seront pas acceptés en raison de la scénographie.
Bord de plateau
Samedi 7 janvier 2023 de 16h à 16h30 environ - Entrée libre
À l'issue de la représentation, un bord de plateau avec le chorégraphe Noé Soulier et l’altiste John Stulz de l’Ensemble intercontemporain, animé par le journaliste Thomas Hahn. L’occasion de revenir sur la génèse de la création du spectacle.
Atelier de dessin de la danse
Lundi 12 décembre 2022 de 18h30 à 21h30 Samedi 14 janvier 2023 (11h-13h) / (14h-17h)
Un atelier de dessin de la danse pour « faire performance » par l’acte même de dessin du danseur !
Une création grand format de Noé Soulier qui explore une approche décentralisée de la chorégraphie, avec les étudiant·e·s du Cndc – Angers, du CNSMD de Paris et les solistes de l’Ensemble intercontemporain dans la Halle du Carreau du Temple !
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Mascarades
Ce solo de Betty Tchomanga invoque la divinité du panthéon Vaudou Mami Wata, monstre des eaux troubles. Animée par une pulsation irrépressible, elle saute sans s’arrêter pour faire surgir une multiplicité de présences aussi désirables qu’inquiétantes.
Betty Tchomanga déploie une danse intense à travers une recherche fouillée, qui touche à l’écologie et aux questions coloniales. Dans Mascarades, elle incarne Mami Wata, divinité mi-femme, mi-poisson, une sirène sexuelle ambivalente, aussi attirante que dangereuse, qui oscille entre le monde des profondeurs et celui des humains.
Juchée sur une estrade, le corps tâché de peinture noire, la chorégraphe, animée de pulsations frénétiques, quitte progressivement son perchoir. Elle grimace, grogne, et rebondit, pour investir le saut vertical, un motif qui évoque plaisir, désir, animalité – évoquant les mœurs déviantes associées à la déesse – qui devient exutoire, expression d’une force humaine brute.
À travers ce solo à l'énergie magnétique, Betty Tchomanga, insaisissable, fait surgir une multiplicité de présences, aussi sensuelles que menaçantes.
Atelier Masques peints sur le visage
Samedi 26 novembre 2022 de 14h30 à 18h30
Un atelier de création de masque peint sur le visage à partir de figures hybrides mythologiques !
Un solo de Betty Tchomanga à la transe magnétique et à la pulsation exutoire autour de la déesse africaine Mami Wata !
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Stabat Mater
Grâce à ses mises en scène subversives, nourries de ses recherches universitaires, qui interrogent les liens entre pornographie et théâtre, Janaina Leite s’est affirmée comme une des artistes phares de la scène brésilienne. Dans la conférence-performance Stabat Mater, Janaina Leite invoque des matériaux autobiographiques, en convoquant sa mère sur scène ainsi qu’un performeur pour former un « triangle incestueux » cocasse, à l'image de documentaires, en narrant l’histoire de la Vierge Marie. Aussi politique qu’intime, cette pièce saisissante reprend le travail de la philosophe et psychanalyste Julia Kristeva pour interroger avec finesse les représentations de la féminité, la sexualité, la maternité, ainsi que les relations complexes qui les lient.
After spectacle
Mardi 18 octobre 2022 à la suite de la performance Stabat Mater dans la salle de spectacle - Entrée libre
Un bord de plateau avec l'artiste Janaina Leite, animée par Rita Grillo, enseignante théatre au conservatoire du 14e arrondissement de Paris. L’occasion de questionner, d’échanger et de partager votre ressenti…
Janaina Leite, artiste phare de la scène brésilienne, pour la première fois à Paris avec sa saisissante performance "Stabat Mater" !
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Echo
Danseur depuis 2010 pour Alonzo King Lines Ballet, le ballet de l’Opéra de Lyon, le ballet de
Lorraine ou Maud Le Pladec, Simon Feltz réalise avec Echo sa troisième pièce de danse.
Simon Feltz dissèque les réflexes de synchronisation entre les gestes et les paroles. Ces phénomènes,
ici considérés comme matériau chorégraphique, font le lit d’un délicat quatuor d’interprètes au
service de la sensualité du langage.
À partir d’un corpus vidéo compilant une large palette d’échanges conversationnels, allant du débat
politique à la téléréalité, l’artiste s’attache à transcrire les corrélations entre langage et gestuelle en
écriture chorégraphique, usant des corps comme d’amplificateurs de la musicalité des voix. Dans toute
conversation, le geste ajoute du sens, l’épaissit. Ce postulat, déplacé dans le champ extrême du
mouvement qu’est la danse, transforme les éléments gestuels et vocaux en partitions dansées et
musicales.
Intonations et tonus musculaire, rythmique des corps et des mots, séquences phrasées
et segments corporels engagés : l’agencement aérien d’une multitude d’impulsions, porté par de
rigoureux mouvements d’ensemble, célèbre la danse des mots dans l’espace.
Un délicat quatuor d’interprètes au service de la sensualité du langage.
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Gustavia
Parmi les chutes, luttes, cris et chuchotements, s’ouvre l’effroyable abîme d’une réverbération vertigineuse des contraintes imposées à la représentation du féminin. Le Carreau du Temple, selon sa volonté de présenter à Paris des pièces majeures, se fait un plaisir d’accueillir cet opus, enrichi de dix années de tournée internationale.
Mouvements entravés par des objets incongrus, paroles superposées, danses électriques, vrais-faux strip-teases sur fauteuils de bureau, collisions, renversements, coups, esquives, détournement des accessoires académiques du théâtre : si l’on reconnaît bien ici certains ressorts et appareils du burlesque, un parfum de Tati, Sellers, Keaton, Chaplin ou encore de Moretti, Blume et Nauman, il s’agit là d’un burlesque purement formel, un comique physique, parfois violent, convoqué pour que jamais la cohérence ne puisse s’installer.
Avec la fraîcheur d’une jubilation à jouer ensemble proprement contagieuse et la maturité de leur inébranlable exigence, les deux figures de proue de la danse nous emmènent au coeur du dédoublement de personnalité de Gustavia, qui régit les modulations des relations entre les deux protagonistes, tour à tour duo, jumelles, doubles ou divas en compétition. Ce coeur est un non-lieu lugubre et fou, dangereux, dont surgit une critique féministe aiguë des impératifs dictés aux femmes pour « jouer » leur genre de façon satisfaisante – dans la vie quotidienne comme dans la création -, avec un bouquet de requêtes incessantes, normatives, souvent grotesques, parfois contradictoires, voire tout simplement impossibles à réaliser.
Une occasion rare de découvrir deux monuments de la danse contemporaine sur un même plateau.
La Ribot recevra le Golden Lion for Lifetime Achievement à la Biennale de Venise en octobre prochain.
Comptant parmi les personnalités les plus charismatiques de la scène chorégraphique contemporaine, La Ribot et Mathilde Monnier, jouant de la ressemblance de leurs silhouettes longilignes et sportives, composent un duo aussi pétillant qu’abrasif.
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D’où vient ce désir…*
*Titre complet du spectacle : D'où vient ce désir, partagé par tant d'hommes, qui les pousse à aller voir ce qu'il y a au fond d'un trou ?
Féru de faits divers et de romans policiers, Thibaud Croisy se glisse dans la peau d’un enquêteur pour nous embarquer dans une fiction qui entremêle une conférence de criminologie et une étrange histoire d'amour.
Dans un paysage scénique imaginé par Sallahdyn Khatir, évoquant à la fois un espace naturel et une zone mystérieuse de notre inconscient, Thibaud Croisy endosse le rôle d’un criminologue et nous livre un cours douteux dans lequel il décode les mécanismes du passage à l’acte.
Parallèlement, le récit d’une histoire d’amour ambiguë avec une jeune médecin légiste passionnée de thanatopraxie l'interroge : mais où sont donc les vrais morts après avoir été passés à la moulinette des grilles d’analyse des experts ?
Dans les dédales de cette romance surréaliste entre deux êtres que rapproche leur fascination pour les cadavres, Thibaud Croisy poursuit sa tentative de redonner corps à une parole charnelle.
À mi-chemin entre le conte macabre et les histoires extraordinaires à la Pierre Bellemare, cette nouvelle pièce du puzzle de Thibaud Croisy prolonge ses questionnements sur le corps humain.
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Toute l’eau et rien que des gouttes
Passionné par la poésie et les mythes anciens, Harris Gkekas entreprend ici une fabrique de sa propre mythologie et d’un lexique chorégraphique proche du langage Pythique. Aux confins du rêve comme du cauchemar, oscillant entre quiétude et inconfort, sa pièce atteint quelque chose de substantiel, qui touche à l’essence de la danse, voire de la vie, en évoquant avec subtilité la croisée de nos chemins, la liberté, la solitude, la fragilité de nos entreprises et l’état de veille extrême que nous apprennent les mythes.
Fort d’un parcours d’interprète impressionnant de collaborations avec de grandes signatures – William Forsythe, Jiří Kylián, Merce Cunningham, Trisha Brown, Saburo Teshigawara... –, le chorégraphe invente ici une danse qui fait de chaque geste un mot, une image, un fragment qui murmure. Plus qu’une trame, c’est une toile énigmatique qui se déplie, un espace tonique et fécond où l’imaginaire circule librement.
Dans un dispositif scénographique minimal, la gestuelle reste tout aussi simple. La virtuosité ne se situe pas à l’endroit de la performance, mais dans l’intelligence de l’agencement et de la décomposition de ces mots-gestes. Reposant sur un parti pris stylistique très fort : un langage qui n’indique pas mais fait signe, ce travail évoque l’acte poétique lui-même, quand faire poème semble plus que jamais nécessaire face à une modernité frénétique, un lieu encore possible d’une insurrection contre le temps. Tel un opus testamentaire, il ouvre la possibilité d’un apaisement.
Trois danseurs aux parcours éclectiques s’imprègnent de poèmes de plumes virtuoses pour créer une « pièce-monde » qui met dos à dos simplicité et immédiateté, en quête de la splendeur endormie dans le ventre de nos actes. Une expérience mystérieuse, un rêve éveillé.
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