Le Souper

En partenariat avec le Centre culturel suisse à Paris

Comédienne, performeuse, ventriloque, transformiste d'exception, Julia Perazzini imagine un dialogue avec son frère décédé. L'artiste invoque et désamorce sa propre peur de la mort pour l'offrir en miroir aux spectateurs et, une fois n'est pas coutume, l'envisager comme une puissance d’activation du vivant.

En conversant avec l'absent, Julia Perazzini élabore une déroutante alchimie entre souffle, corps et voix, qui réveille notre relation avec l’invisible, l’irrationnel, donne la parole aux recoins endeuillés ou figés de nous-mêmes. Elle méduse l'étrangeté, voire la légitimité, de la frontière entre ce qui est dit « absent » et dit « présent ». Pouvons-nous transgresser les règles des possibles connexions entre les êtres ? Il y va de la constitution d'un « nous ».

Elle n'a pas connu ce frère, disparu avant qu'elle ne naisse. C'est ainsi dans un grand vent de liberté formelle, mais avec pudeur et délicatesse, que l'artiste s'autorise à rêver que la vitalité de son frère pourrait réinsuffler de la vie là où les choses sont gelées, révélant ce terreau créatif et incorruptible de nos parties enfouies. Passé et présent, conscient et inconscient se cognent, laissant jaillir par étincelles les failles des mosaïques qui nous composent, tous ces petits « jeux » au sens mécanique qu'explore méticuleusement l'artiste. Sur une scène presque vide se livre un jeu qui flirte avec le « non-jeu », soulignant la finesse de l'écriture, et, surtout, la déconcertante performativité de Julia Perazzini. Une sublimation psycho-magique de nos angoisses.

Artiste d’exception aux multiples talents, Julia Perazzini imagine dans « Le souper » un dialogue avec son frère décédé, transformant notre peur commune de la mort en puissance d’activation du vivant.

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Sa bouche ne connaît pas de dimanche

Il y a des pièces qui, tout à la fois, persistent au fond de nos rétines, restent gravées dans nos cœurs et bousculent définitivement notre approche de la société contemporaine. Ce duo abrasif, intime, viscéral, diablement drôle et allégorique, en fait partie.

La première image donne le ton : sur le plateau, piscine gonflable, tapis rose, tenues vestimentaires extravagantes et, très vite, un cochon, de ceux que l’on élève et abat en Bretagne, et que l’on célèbre, à table, à Noël en Martinique, importés par les premiers colons. À l’appui d’un texte aussi cinglant que poétique, criblé de savoureuses pépites, et d’un jeu performatif avec de faux matériaux : faux sang, fausses mailles, fausse fourrure, et une matière vraie et bien vraie, organique : eau, viande, pigment, Rébecca Chaillon en bouchère butch et Pierre Guillois en Christ gay nous embarquent dans un joyeux délire... pas si saugrenu qu’il n’y paraît.

Au départ, ils se sont amusés à coécrire leurs parcours respectifs. À l’origine de Rébecca, la Martinique. À l’origine de Pierre, la Bretagne. Mais Rébecca prend conscience qu’elle est noire et Pierre, qu’il est homosexuel. Dépliant les couches de la genèse de leurs personnes, ils dénudent leur rapport ambigu au catholicisme, au sacré, à la pureté. La chair vient tout naturellement souder ces questionnements, celle de l’animal, celle que l’on mange, celle qui cristallise le paradoxe entre plaisir du goût du sang et sentiment de culpabilité de la tuerie nourricière. Créatures divines et personnages profanes, les deux artistes invoquent aussi la société dont ils rêvent.

« Sa bouche ne connaît pas de dimanche », une fable déjantée au pays des faux semblants où Rébecca Chaillon et Pierre Guillois se racontent et tombent les masques !

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